]insofern[
La machine développée par Cod.Act, un scanner mobile, permet de sonder un cerveau humain synthétique. Isolé dans un sas, en tête à tête avec l’encéphale, un spectateur est convié à une incursion sonore et visuelle dans un univers mouvementé et translucide.
Au passage du scanner, traversée par le flux lumineux, la masse nerveuse s’agite, se dilate et émet des sons. Par fragment, elle libère les informations prisonnières de ses tissus, vestiges d’un contact sensoriel avec le monde extérieur.
Par une transmission simultanée de l’opération, l’aventure individuelle franchit les limites de l’espace protégé du sas et accède à l’ensemble des spectateurs. Une mémoire se répand dans un lieu public…
expositions
2023
- MEN Festival, Kaleidophonia, Wroclaw (PL)
2021
- Total Cod.Act, Retrospective, La Chaux-de-Fonds (CH)
2012
- Exposition Cod.Act, Espace Multimédia Gantner, Bourogne (FR)
2007
- Semaines Internationales de la Marionnette, Neuchâtel (CH)
2005
- Earweare 05, Sound Art Festival, Bienne (CH)
- Science et Cité/Brainweek 05, Musée des Sciences, Genève (CH)
- Mobileart 05, symposium Genetics&Art, Göteborg (SE)
2004
- Piano Nobile, 10ème Biennale de l’Image en Mouvement, Genève (CH)
2003
- Centre Culturel ABC, La Chaux-de-Fonds (CH)
- Ostquai Kunstverein, Bâle (CH)
- Musée Cantonal des Beaux-Arts, Lausanne (CH)
description
]insofern[ est une installation composée d’une table et d’un plan de verre sur lequel repose un corps translucide en convulsion permanente. Le visiteur peut déplacer un dispositif d’observation mobile formé d’un système optique avec écran (le scanner) et de deux haut-parleurs (le stéthoscope). Il peut ainsi sonder le corps translucide et, grâce aux mouvements qu’il imprime au dispositif, il vit en direct, par des images et des sons, les effets de ses investigations. L’ensemble des spectateurs présents peut participer à cette aventure individuelle grâce à une transmission simultanée de l’opération.
Cod.act et le cerveau
Que ce soit pour sa nature élémentaire et ses propriétés physiques (dans la performance Siliknost) ou pour les capacités mnésiques de sa structure (dans la performance Bach/Mendeleïev-5 épreuves), la matière forme une source d’inspiration majeure dans les travaux de Cod.Act. Dans ]insofern[, Cod.Act s’intéresse cette fois à la matière vivante : une matière qui paraît au premier abord assez uniforme et inerte, mais dans laquelle agit, à une échelle insaisissable, un nombre incalculable de mécanismes intelligents et extrêmement complexes. Le cerveau en est l’exemple particulièrement représentatif. Composé de régions fonctionnelles et de réseaux interconnectés qui sans cesse travaillent de concert, il est capable de recevoir, de traiter, de stocker, de prendre en compte un flux continu d’informations.
En réalisant une installation pilotée traitant du cerveau, Cod.Act ne propose pas au visiteur un voyage dans les méandres de la mémoire à travers un patchwork d’images représentant des souvenirs plus ou moins marquants. Mais il lui offre une expérience sensorielle au coeur de la matière cérébrale en activité. ]insofern[ présente un modèle empirique et synthétique d’un minuscule échantillon de matière cérébrale qu’on aurait fortement agrandi. Il engage à y pénétrer et à découvrir cet univers organique en mouvement, là où la matière sans cesse se dilate, se transforme et émet des sons, réagissant aux phénomènes de traitement, de tri et de transport de l’information à travers les zones fonctionnelles du cerveau.
Le cerveau synthétique d’ ]insofern[
L’échantillon provient d’une zone non végétative du cerveau, là où opèrent les mécanismes liés à la personnalité et à l’intuition. Il se divise en quatre parties distinctes et interconnectées qui sont: la pensée, la connaissance, les relations sociales et les affects. Chacune d’elles présente une morphologie plastique et sonore propre à sa fonction et comporte deux couches dans lesquelles les informations sont inscrites sous forme d’empreintes sonores et visuelles abstraites et peu identifiables.La couche supérieure reçoit les informations sensorielles provenant de l’extérieur. Elle teste leur validité, définit leur valeur en fonction de facteurs de jugement propres à l’individu, tels que l’ego, le profit ou la conscience. Elle agit de manière logique et structurée. Dans cette couche, les empreintes sonores et visuelles apparaissent sous forme d’un code, d’une sorte de trame visuelle et sonore. Des fragments de phrases vocales et de textes écrits y jouent le rôle d’aiguillages (dans le tri des valeurs). La couche inférieure est plus épaisse et de nature plus grossière et organique. Ses empreintes sont aussi plus profondes et plus diffuses. Elles représentent des modifications anatomiques du cerveau résultant d’expériences plus anciennes ou des agglomérats de neurones symbolisant des impressions lointaines, fragmentées puis reconstruites, ou des informations consolidées par leur propre répétition, leur importance.
Animées de convulsions, les deux couches communiquent. Le scanner les saisit tantôt indépendamment l’une de l’autre, tantôt confondues ou glissant l’une contre l’autre. Le spectateur reçoit donc une imagerie sonore et visuelle en constante transformation. Une imagerie qui reflète ce milieu transitoire et impalpable où notions nouvelles et expériences accumulées se consultent, deviennent concepts et hypothèses, se comparent, pour s’assembler finalement en constructions logiques qui dicteront le comportement.
Le fonctionnement de la machine
le dispositif d’observation est équipé d’une source lumineuse et d’un objectif. Le corps translucide, fixe, se trouve entre les deux à la manière d’une diapositive dans un projecteur. L’image fortement agrandie de la partie du cerveau que l’on scanne est ainsi projetée sur l’écran. Le corps translucide est divisé en trente-deux zones virtuelles, toutes beaucoup plus grandes que la partie observable à l’écran. La position du dispositif d’observation sur cet échiquier définit d’une part le numéro des séquences sonores à entendre, d’autre part la séquence des mouvements de gonflage et de vidange qui animent le cerveau, et enfin la suite des mouvements de l’objectif optique par rapport aux deux couches de ce corps. Cette dernière commande a un double effet : appliquée à un dispositif d’autofocus, elle assure tantôt la netteté de l’image sur une couche ou sur l’autre, tantôt le fondu entre ces deux couches; appliquée au système sonore, elle a une action semblable. Le curseur dont dispose le visiteur ne sert qu’à faire des corrections éventuelles. Toutes les mesures et commandes sont assurées par un automate programmable industriel (Logic Controller).
Le corps synthétique
La matière du corps est une résine silicone transparente. Les empreintes de la couche supérieure ont été faites par coulage du silicone sur des plaques d’imprimerie gravée aux ultraviolets à partir de dessins. Les empreintes de la couche inférieure ont été modelées dans une pâte de polyester qui a ensuite servi de moule pour le silicone. Pour obtenir une meilleure ressemblance avec une matière vivante, celui-ci a été partiellement exposé à de très hautes températures dans le but d’accélérer sa réticulation et de provoquer des modifications de sa structure. Elles apparaissent sous la forme de pores, de cratères et de fissures.
Le son
Le son d’ ]insofern[ entretient deux types de relation avec le cerveau. Le premier concerne la fonction de chacune des quatre parties et le deuxième, leur structure organique. Des voix concrètes ont été enregistrées et apparaissent sous plusieurs formes: tantôt proches et distinctes, tantôt organisées en dialogues, ou confuses se répandant telle une rumeur, ou encore étouffées, comme prisonnières de la matière sonore et libérées par fragments. Une composition sonore, combinant des sons concrets retravaillés et des sons synthétiques fabriqués, exprime l’activité interne de l’organe, une sorte d’amplification des micro-sons générés par son activité vitale. Des bruits organiques tels que respirations, souffles et déglutitions ont été enregistrés, amplifiés, et traités à l’atelier. Ils sont ensuite combinés entre eux et mixés à des sons électroniques de synthèse également produits à l’atelier. Ils représentent le flux électrique du système nerveux.
Tous ces éléments sonores sont assignés aux différentes zones virtuelles du corps synthétique. Lorsqu’on déplace le scanner, l’automate déclenche la séquence sonore correspondant à la zone dans laquelle on se trouve et commande un système de transformation sonore en temps réel en relation directe avec les mouvements verticaux de l’objectif. Ces transformations affectent différents paramètres du son comme la hauteur et le volume et agissent sur des filtres et des modulateurs.
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